Arrivé devant le râtelier de bouteilles, vous constatez, en regardant à travers, qu'il n'y a plus aucun agent dans le cellier. Comme l'Italien l'a dit à son interlocuteur au téléphone, la police est partie le soir venu. La voie est donc libre. Dans ce sens, ouvrir le passage secret est un jeu d'enfant : le levier de commande est apparent dans le mur, et même bien en évidence. Vous le faites jouer, faites coulisser le pan de râtelier et vous retrouvez dans le cellier. Les enquêteurs ont fouillé la pièce, cela se voit au nombre de bouteilles sorties de leurs caisses, mais vous avez l'impression qu'ils l'ont surtout fait pour la forme, l'endroit ne présentant pas plus d'intérêt que la nuit dernière. Après avoir précautionneusement refermé le passage secret derrière vous, si vous n'avez pas déjà un sandwich ou une boîte de conserve, vous pouvez faire main basse sur une conserve de raviolis ou de petit salé aux lentilles, histoire d'avoir des provisions sur vous. Compte tenu du poids et de l'encombrement d'une boîte, vous ne pouvez en prendre qu'une seule ; vous ne pouvez pas en stocker davantage dans votre parka. Si vous préférez, vous pouvez prendre à la place une bouteille de vin rouge. Si vous prenez quelque chose, notez-le alors sur votre Feuille d'Aventure.
Vous remontez prudemment l'escalier jusqu'au rez-de-chaussée. Vous entrouvrez la porte et y risquez un oeil. Personne en vue, aucun bruit... le Chicago Ace doit être vide. Vous franchissez l'huis, mais prenez bien soin de ne pas passer sous la caméra de surveillance fixée au plafond. Elle ne peut pas vous filmer quand vous venez de la cave : elle est tournée vers la salle commune du bar et vers le couloir qui conduit aux cuisines et à la porte de service. A côté de la porte que vous venez de franchir, l'autre porte, celle qui conduit à l'étage, a toujours sa serrure détruite qui pend. La grande salle du bar non plus n'a pas trop changé depuis hier : elle est toujours dans un grand désordre, les policiers ont tout laissé en l'état : tables et chaises renversées, cendriers en morceaux sur le sol, etc. Ils se sont contentés d'entourer à la peinture blanche phosphorescente les impacts de balles sur les murs et boiseries, pour les indiquer à la balistique.
Passant par la grande baie vitrée de la devanture, la lumière des lampadaires dehors éclaire chichement l'endroit, mais vous permet, sans allumer les néons, d'en contempler la décoration un peu plus longuement que dans la précipitation d'hier soir. Le style "Al Capone" du Chicago Ace a été travaillé : les banquettes usagées, les chaises en bois, les tables sur lesquelles trônent des cendriers -vides- aux marques obsolètes, les lustres aux abat-jour démodés... tout est dans le style des bars du temps de la prohibition. Sur les murs sont affichés des posters du boxeur James J. Braddock ou de l'actrice Veronica Lake. Derrière le comptoir trône une statue d'un loup sorti tout droit d'un Tex Avery et au fond de la salle, un vieux juke-box à pièces propose plusieurs vinyles de swing. Seule la borne d'arcade The Punisher dépareille au tableau.
Les forces de l'ordre ont dû prendre tout ce qu'il y avait à prendre ici, il serait inutile de vouloir fouiller le comptoir derrière eux. Soudain, la tête vous tourne au point de vous donner la nausée. Sans comprendre pourquoi, vous avancez, passez sous la caméra de surveillance et traversez la salle commune, jusqu'à la porte d'entrée. Votre démarche est mécanique, vous ne maîtrisez plus vos gestes. Vous avez l'impression de revivre quelque chose. En rebroussant chemin vers la caméra et les deux portes, vous êtes brusquement saisi de vertiges. Votre vision se trouble, puis un grand flash vous aveugle.
Sans pourtant faire le moindre pas, vous vous voyez traverser cette grande salle, un pistolet sans silencieux à la main. Tous vos mouvements sont au ralenti, comme si vous visionniez un film. Les images autour de vous sont déformées et un silence étrange vous entoure, comme si vous vous étiez mis la tête dans un aquarium. Vous passez sous la caméra et parvenez aux deux portes, fermées maintenant. Vous voulez ouvrir celle de gauche mais elle est solidement verrouillée. Vous tirez dans la serrure à bout portant pour la forcer. Sitôt ouverte, vous montez les escaliers quatre à quatre, en apesanteur, et vous traversez un long couloir jusqu'à une porte marquée "Vitto Vogel". Vous la poussez lentement et découvrez derrière un abominable spectacle : le cadavre d'un homme dans son fauteuil, couvert de sang.
Les images suivantes sont plus confuses. Vous regardez le sol et y découvrez des traces de pas blanches. Vous entendez quelqu'un venir, alors vous battez en retraite et allez vous cacher derrière une autre porte. Dans le noir, vous entendez des bruits de pas, puis des bruits étranges que vous ne parvenez pas à identifier. Vous sortez de votre cachette et retourner dans la salle "Vitto Vogel". Vous y surprenez une ombre tenant un chalumeau à la main. Vous la pointez du doigt et vous vous écriez : "Antarès !" L'ombre se met alors à vous tirer dessus ! Vous vous mettez à courir, courir, courir... Tout d'un coup, un nouveau flash lumineux vous aveugle. Vous vous réveillez, dans la grande salle du Chicago Ace. Vous n'avez en réalité pas bougé depuis le premier flash. Le temps de reprendre complètement vos esprits, vous comprenez ce qu'il vient de vous arriver : vous venez de revivre une scène que vous avez déjà vécue. Vous venez d'avoir un flash-back !
Vous vous concentrez pour bien fixer cette nouvelle pièce du puzzle dans votre tête. Dédé le clochard avait dit vrai : vous êtes bien venu ici avant de perdre la mémoire. Et c'est donc vous qui avez fait sauter la serrure de la porte de gauche, derrière la caméra. Qui était cette ombre ? Quand cette scène s'est-elle déroulée ? Etait-ce la nuit du meurtre ? Vous êtes incapable de l'affirmer. Notez sur votre Feuille d'Aventure que vous avez eu le Flash-Back 3, avec le numéro de ce paragraphe pour pouvoir vous y référer.
Allez-vous maintenant franchir la porte à la serrure brisée et monter à l'étage, pour suivre le chemin que vous avez pris dans votre flash-back ? (rendez-vous pour cela au
356)
Si vous préférez ne pas rester ici plus longtemps, vous ne pouvez pas sortir par la porte d'entrée du bar, close ; il ne vous reste comme seule issue la porte de derrière, qui n'est pas verrouillée, mais en la franchissant vous briserez automatiquement les scellés que la police y avait apposés (vous partirez ensuite au
1373).