- Deux points de cette affaire m'intriguent, déclare alors Montanes.
Il jette un regard à l'assemblée, pendue à ses lèvres. Il se tourne vers Didier Dattaque :
- Je trouve étonnant, Mr le PDG, que vous vous soyez découvert si tard cette envie d'être dirigeant. D'après mon enquête, vous aviez toujours été un oisif jusque là.
- C'est ce que les gens disaient de moi mais c'était faux ! se défend l'intéressé. J'attendais le moment propice pour le montrer à père, mais je n'en ai pas eu l'occasion... C'est vrai que j'ai sans doute un peu manqué de sérieux, que je me suis trop laissé aller à la nouba. Mais quand j'ai appris la mort de père, j'ai réalisé certaines choses.
- L'État compte sur vous pour gérer Dattaque Industries dans la lignée de votre père, en partenariat privilégié avec le gouvernement, intervient le Ministre, diplomate.
Les actionnaires opinent et l'y encouragent également.
- Votre père est mort il y a seulement cinq jours, Mr Dattaque, tranche Montanes, sentencieux. Le délai est un peu court pour réussir un coup comme celui d'hier au conseil d'administration. Vous avez tout improvisé sitôt votre père décédé ?
Comme l'héritier refuse de répondre, sa sur explose et l'accuse de malversations ; son frère n'est même pas venu à l'enterrement de son père et il ose invoquer sa mémoire ? C'est Montanes qui doit les calmer. Pour cela, il se tourne à présent vers Anne-Sophie, afin de la cuisiner à son tour :
- L'autre point qui m'intrigue dans cette enquête, c'est votre alibi, Mlle Dattaque. Vous avez déclaré que, la nuit du meurtre, vous étiez chez vous et que votre bonne pouvait en témoigner.
- C'est exact.
- Dans ce cas-là, expliquez-moi pourquoi, lorsque j'ai consulté vos relevés téléphoniques, il est apparu que, cette nuit-là, vous avez appelé de votre portable sur le fixe de votre propre maison ? On ne se parle plus de vive voix chez vous ?
Elle est déstabilisée par cette pertinente observation et met un moment avant de bafouiller une explication :
- C'est que... j'étais dans mon lit et j'avais la flemme de descendre réveiller ma domestique, alors je l'ai appelée...
- Ce policier de pacotille n'a même pas tenté de localiser le portable, vous chuchote Cardoze.
C'est Laurent qui vole au secours d'Anne-Sophie. Il demande au contre-espion d'arrêter cette mascarade : il n'a pas besoin de les harceler comme il le fait, de surcroît devant un membre du gouvernement, alors qu'il tient déjà son suspect.
Le Ministre demande à Montanes à qui il est fait allusion. Le contre-espion explique que son suspect n°1 dans l'affaire est Robert Bolet, suite à une déduction dont il ne vous laisse pas la paternité.
- Bolet est connu de mes services comme le Colonel, un espion de seconde zone. Ses agissements au bal de l'ambassade plaident contre lui. Personnellement, j'ai la conviction qu'il n'est qu'un pion dans cette affaire mais, dans le doute, j'ai lancé un avis de recherche pour qu'on le retrouve au plus vite.
- Quoi ? Mr Bolet, un espion ? s'interloque Anne-Sophie.
À part Laurent, qui l'a appris on ne sait comment, toutes les personnes présentes sont abasourdies par cette révélation. Quand Loyson voit que Didier, lui non plus, n'est nullement surpris, il s'en prend à lui ouvertement :
- C'est comme ça que tu as eu la majorité au conseil d'administration hier : t'as fait chanter Bolet et t'as fait main basse sur ses actions, ordure !
L'héritier s'indigne de cette attaque et riposte de façon tout aussi peu amène. Le Ministre est à nouveau obligé de calmer tout le monde. Puis il dit à Montanes :
- Même si cette piste est maigre, l'urgence de la situation est telle que nous ne pouvons pas nous permettre de la négliger. Je vais faire émettre un mandat d'arrêt international à l'encontre de Robert Bolet. Je vais également dire au Chef d'État de faire appel à nos alliés européens et américains pour prévenir tout péril nucléaire. (il menace ouvertement l'ambassadeur Sakadov :) Nous savons que vous êtes le contact de l'Agent X, Monsieur. Je ne peux rien faire contre vous aujourd'hui, je le sais. Mais si l'un de nos secrets nucléaires venait à tomber entre des mains ennemies, je peux vous assurer que vous le paierez cher.
L'adipeux diplomate s'en moque :
- Vu comme je suis mal accueilli dans ce pays, je demanderai à mon Président de me muter ailleurs.
Le Ministre se lève pour signifier la fin de cette réunion. Il en appelle à toutes les bonnes volontés : elles doivent se mettre à la disposition du Ministère, pour la sauvegarde des intérêts du pays et du monde libre. Il invite tous les protagonistes à maintenir leur pression et leur vigilance ; il ne faut pas perdre espoir. Il se tourne vers le commissaire et vous :
- Messieurs, je vous prie d'apporter toute votre aide à mon Ministère aussitôt que nous vous solliciterons.
Il vous regarde. Il vient de s'adresser à vous. Vous sentez que c'est l'occasion ou jamais. Vous avez moins d'une seconde pour prendre votre décision.
Si vous osez dire au Ministre que vous avez résolu cette affaire, rendez-vous au
660.
Si vous préférez garder le silence de peur de vous ridiculiser, rendez-vous au
699.