Nils Jacket Contre l'Agent X, le site officiel des Enquêtes de Nils Jacket

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La limousine emprunte des rues désertes à cette heure. Les rares passants ne font guère attention à son passage. Discrète, elle sort bientôt de la ville et prend les routes de campagne, privées d'éclairage électrique, plongées dans l'obscurité de la nuit.

Bolet ne dit rien. Vous sentez qu'il ne veut pas parler tant que vous n'êtes pas arrivés. L'ambiance est pesante. À part vous deux, il n'y a que le chauffeur dans la voiture. Mais vous ne le voyez pas, car les places avant du véhicule sont séparées de vous par une vitre teintée. Vous vous contentez de regarder par la vitre le paysage qui défile pour tromper votre ennui... et ne pas montrer de signe de nervosité. Dans quelle galère vous êtes-vous encore fourré ?

La limousine finit par arriver à destination : la propriété de campagne de Bolet. Le portail d'entrée donne sur une petite cour intérieure boisée, dans laquelle vous vous arrêtez enfin. La cour est ceinte de bâtiments rappelant une ferme cossue, tandis que le bâtiment principal a les allures d'un hôtel particulier champêtre, parfaitement entretenu. La résidence secondaire est luxueuse. Nul doute que Bolet ne doit pas être dans le besoin pour pouvoir s'offrir un tel domaine.

Le chauffeur vous ouvre la portière. Vous le découvrez enfin : c'est un gaillard très maigre, aux traits creusés, entre deux âges. Vous suivez Bolet jusqu'à l'entrée de la maison, où vous accueille un majordome propre sur lui, style école anglaise. Vous traversez à sa suite un grand hall et êtes introduit tout de suite dans le grand salon. Des trophées de chasse et des tableaux ornent les murs à moitié lambrissés. La salle doit servir également de bureau, car vous remarquez un secrétaire dans un coin. Une grande cheminée, dépourvue de feu à cette époque de l'année, trône à l'autre bout de la pièce. Un lustre majestueux en éclaire vivement le centre, un carré formé de fauteuils et d'un sofa, entourant une table basse sur laquelle vous attendent des rafraîchissements. Ils ne sont pas les seuls à vous attendre.


Une personne était déjà présente dans le salon. Une superbe jeune femme, en robe de soirée noire et discrète, portant de longs gants de velours de couleur assortie, se lève à votre arrivée et vient à votre rencontre.

- Mon cher Jacket, laissez-moi vous présenter la charmante Mlle Zadilova, dit Bolet d'un ton joyeux. Ma chère, voici Nils Jacket, le détective chargé par ma société de résoudre le meurtre de mon ami Louis.

Mlle Zadilova vous tend la main dans l'intention que vous la baisiez, ce que vous finissez par comprendre suffisamment vite pour ne pas paraître rustre. Vous échangez les salutations d'usage tout en vous dévisageant l'un l'autre. C'est une femme très belle, très sensuelle, à qui vous donneriez trente ans tout au plus. Ses cheveux blonds très soyeux sont ramenés en arrière par de fines barrettes. Elle a les lèvres très rouges et pulpeuses, ainsi que de grands yeux bleus qui vous fixent intensément, comme s'ils vous dévoraient sans l'avouer. Le charme slave dans toute sa splendeur.

Bolet bafouille le reste de sa présentation :

- Mlle Zadilova a pour métier... de... d'aider les gens à récupérer des choses...

- Je suis une mercenaire, quoi ! dit-elle plus explicitement. Un peu comme vous, d'ailleurs : je me vends au plus offrant.

Déstabilisé par tant d'aplomb, vous ne parvenez pas, sur le coup, à articuler une protestation digne de ce nom, ce qui ne manque pas d'amuser votre interlocutrice. Vous avez affaire à une femme directe, qui ne prend pas de gants. Sa voix enrouée peut contraster avec la grâce de ses traits, mais elle s'exprime dans un français impeccable. Si son verbe ne suffisait point, son parfum aussi ne passe pas inaperçu. Une entêtante fragrance de fruits rouges. Vous avez l'impression d'avoir déjà humé ces notes récemment...

- À quoi pensez-vous, Mr Jacket ? vous demande-t-elle à brûle-pourpoint.

- À votre parfum. Je n'arrive pas à le définir.

- Poison, de Dior.

Le sourire narquois qui accompagne sa réponse vous met mal à l'aise. Un nom de parfum qui en dit long sur celle qui le porte !

Notez le mot-code "ABUXER" dans votre Journal d'Enquête. Bolet fait servir une collation, accompagné d'un xérès qui n'a pas l'air mauvais. Assis sur le sofa à côté de Mlle Zadilova, vous décidez d'assouvir enfin votre curiosité :

- Mr Bolet, vous me disiez cacher des choses à tout le monde depuis le début de l'enquête. Pouvez-vous m'en dire davantage maintenant ?

En proie à un cas de conscience, Bolet semble encore hésiter. Il n'arrive pas à s'asseoir. Mais s'il vous a fait venir ici, c'était bien pour vous le dire. Il boit un verre de xérès pour se donner du courage et vous annonce :

- Je sais qui a assassiné Louis Dattaque.

- Quoi ?! vous écriez-vous. Mais pourquoi ne pas l'avoir dit à la police ?!

- C'est compliqué.

Enfin assis, Il vous expose son souci, en se tirant l'oreille nerveusement :

- Dattaque Industries bosse depuis plusieurs mois sur un projet top secret, confié par l'État. Ce projet est un nouveau système de défense des sous-marins nucléaires. Des nations étrangères aimeraient bien mettre la main dessus. Louis en gardait les plans dans le coffre de son bureau et personne ne pouvait y avoir accès à part lui. Personne ne savait même, à part ses proches collaborateurs, que les plans étaient là. Lorsque nous avons découvert Louis mort hier soir, je me suis immédiatement inquiété au sujet des plans. Avec raison : ils n'étaient plus dans le coffre ! Ils ont été volés par l'assassin. C'est ce qui m'a tout de suite indiqué son identité.

- Qui est-ce donc, alors ?

- Le Ministre de la Défense m'avait depuis longtemps fait part d'une information découverte par ses services de renseignements : une puissance étrangère cherche à obtenir les plans coûte que coûte et, pour cela, a engagé le plus terrible mercenaire-espion qui existe.

- L'Agent X ? osez-vous.

- Exactement. L'espion à la triste et internationale renommée. EXceptionnellement rusé, eXtrêmement doué, eXcessivement dangereux. Personne ne sait qui il est vraiment, son visage est inconnu de tous les services secrets, notamment à cause de sa compétence à se déguiser. On dit même qu'il aurait été formé aux arts sombres asiatiques et serait un ninja accompli, capable de grimper aux murs comme une mouche ou de disparaître dans les ténèbres comme par enchantement. Lorsqu'une mission lui est confiée, il est impossible de lui résister, et Louis a payé de sa vie pour le comprendre.

- Êtes-vous sûr que c'est X le coupable ?

- Sûr et certain. Lui seul pouvait s'introduire comme il l'a fait, par la fenêtre, et disparaître. Et surtout, il a signé son crime : le "X" tracé avec le sang de Louis sur le mur. C'est sa façon de narguer les autorités : en disant bien que c'est lui qui a commis le forfait sans qu'on puisse retrouver sa trace. D'autres raisons étayent ma certitude, je vais vous les exposer dans un instant. Non seulement je veux arrêter l'Agent X pour venger feu mon associé, mais surtout il me faut absolument récupérer les plans qu'il a volés avant qu'il ne les transmette à ses employeurs. Il en va de la défense nationale !

- Vous devez en parler à la police, ou au moins au ministère ! vous indignez-vous.

- Oh non, surtout pas ! Si le gouvernement apprenait ce qui se passe, ce serait la fin de l'entreprise ! Si le projet nous était retiré à cause de cette faille dans notre sécurité, il nous serait impossible d'éviter le dépôt de bilan avec simplement nos autres contrats. C'est pour cela que je veux d'abord tenter une action "interne", informelle. Sans y mêler les pouvoirs publics. De façon à récupérer les plans et rassurer le ministère. Et c'est là que Mlle Zadoliva entre en scène.


La belle mercenaire explique à son tour :

- Au courant de ma réputation d'efficacité, Mr Bolet m'a engagée pour démasquer l'Agent X. Comme tout le monde, j'ignore qui il peut être, mais j'ai appris de source sûre qu'il était en ville actuellement. Son contact est l'ambassadeur de Biélorussie. Ce dernier a décidé, du jour au lendemain, de donner un bal à l'ambassade demain soir. Cette décision, surprenante et précipitée, est un indice : c'est à cette occasion que X compte lui transmettre les plans.

- Ils ne peuvent pas se rencontrer de façon plus discrète ? demandez-vous, sceptique.

- Non, car l'ambassadeur est un agent double bien connu des services secrets de votre pays ; il est constamment surveillé par le contre-espionnage. Toute visite qu'il reçoit est suivie de près. Un bal est la parfaite occasion de rencontrer beaucoup de monde et ainsi ne pas se faire repérer. Vous avez encore beaucoup à apprendre sur le monde du haut espionnage, mon cher Nils.

Cette dernière remarque vous pique au vif :

- Et qu'attendez-vous de moi, petit détective ignorant ?

- Je veux que vous vous rendiez à ce bal pour moi, indique Bolet. Mlle Zadilova sera sur place elle aussi ; elle a ses entrées à l'ambassade. Vous aurez tous deux pour tâche d'intercepter l'Agent X. Je sais que ce sera difficile, mais en combinant vos talents, vous pouvez y arriver. Mlle Zadilova est connue comme mercenaire par l'ambassadeur, et sûrement par X. Elle ne peut donc pas enquêter et interroger tout le monde comme vous pouvez le faire. Vous êtes le détective de Dattaque, on ne se doutera pas que vous connaissez la dimension espionnage de l'affaire et on ne se méfiera pas de vous. Vous aurez davantage de chances de deviner qui est X. Mlle Zadilova se chargera alors de "le mettre hors d'état de nuire". Elle a les capacités physiques pour cela, et elle aura des hommes avec elle. Est-ce que vous acceptez cette mission ?


Réfléchissez bien :

Si vous dites oui, rendez-vous au 433.

Si c'est non, rendez-vous au 195.