Nils Jacket Contre l'Agent X, le site officiel des Enquêtes de Nils Jacket

Paragraphe 600

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Les présentations terminées, le commandant aux cheveux gominés peut entamer sa démonstration :

- Comme vous le savez, si je vous ai fait venir ce matin pour cette réunion informelle, c'est à la demande de Monsieur le Ministre ici présent, dans le but de faire le point sur l'enquête qui vous touche tous ici de près ou de loin : celle sur l'assassinat de Louis Dattaque.

- Aucun d'entre vous n'ignore, je l'espère, que l'homicide commis sur Mr Dattaque dépasse largement le cadre d'une affaire criminelle, enchaîne le Ministre. Le défunt détenait les plans secrets d'un système de sécurité qui s'inscrit dans le système de défense nucléaire de notre pays, et ces plans ont été volés le soir du meurtre. Il est donc clair que nous sommes face à une affaire d'espionnage de grande envergure. La sûreté de notre pays étant en jeu, dès que j'ai été informé du meurtre par Mr Loyson, j'ai mandé, sur ordre du chef d'État, le commandant Montanes pour qu'il enquête et retrouve le coupable au plus vite.

- Mr Dattaque a été tué dans son bureau, fermé de l'intérieur, entre 20h et 23h, reprend le contre-espion. La mort a été donnée par balle, tirée avec silencieux et à bout portant, d'après l'expertise balistique. Le corps a été retrouvé à 23h15 environ, par Thomas Nache, le garde du corps de Mr Dattaque. Voici le déroulement des faits tel qu'on le connaît. À 20h, Mr Dattaque s'est enfermé dans son bureau du 9ème étage du building et a demandé qu'on ne le dérange sous aucun prétexte. Le garde du corps est resté posté devant la porte. À 23h, comme son patron ne donnait plus signe de vie, il l'a appelé. N'entendant aucune réponse, il a voulu forcer la porte. N'y parvenant pas seul, il est allé chercher Mr Loyson et Mr Bolet, ainsi que des personnes du service de sécurité. Ensemble, ils ont défoncé la porte du bureau et ont découvert le cadavre.

- Nache est donc la dernière personne à avoir vu Louis Dattaque vivant ? demande le Ministre.

- Oui, hormis l'assassin, cela va de soi. Personne n'a pu pénétrer dans le bureau par la porte sans passer devant lui, et d'après son témoignage, personne n'est venu. L'assassin serait donc passé par la fenêtre. Plusieurs indices vont dans le sens de cette hypothèse, aussi extraordinaire qu'elle puisse paraître. Comme nous l'a précisé Mr Loyson, la fenêtre était grande ouverte lorsque lui et les autres sont entrés dans la pièce et ont trouvé le corps. La porte était bien fermée de l'intérieur : la clef était dans la serrure, côté intérieur. Un gardien de nuit affirme avoir aperçu une ombre noire s'introduire par la fenêtre du bureau dans les heures où le crime a été commis. Enfin, des marques de grappin ont été découvertes sur le rebord du toit, pile à la verticale du bureau de Mr Dattaque.

- Vous voulez dire, demande Anne-Sophie, que l'assassin est descendu en rappel le long du toit, est passé par la fenêtre et a abattu mon père ? Cela paraît incroyable.

- Le tueur que nous suspectons a des capacités physiques hors du commun, Mademoiselle.

- C'est quand même étonnant, note le Ministre, que le garde du corps n'ait pas entendu Mr Dattaque crier. C'est ce que j'aurais fait si j'avais vu quelqu'un entrer par la fenêtre dans mon bureau du 9ème étage !

- L'assassin a attendu le bon moment : quand sa proie a ouvert son coffre-fort, en lui tournant le dos. Il a alors pu agir par surprise. Il était d'ailleurs obligé de procéder ainsi, car seul Dattaque connaissait la combinaison.

- Mais comment l'assassin a-t-il fait pour s'enfuir ? questionne Laurent. S'il était descendu en rappel jusqu'au pied du building, les gardiens ou les caméras de vidéosurveillance l'auraient immanquablement repéré.

- C'est pourtant simple. Après son crime, il n'est pas descendu, il est remonté. Il se trouvait déjà dans l'immeuble avant de perpétrer son forfait, et il y est entré de nouveau après.

- Mais alors il n'a pas pu échapper à nos caméras ! Le seul moyen de sortir c'est de passer par le hall d'entrée, et les vigiles l'auraient remarqué !

- Précisément, Mr Loyson. Vos vigiles et vos caméras ne l'ont pas remarqué. Ce qui ne veut pas dire qu'ils ne l'ont pas vu.

- Vous voulez dire que... le meurtrier serait quelqu'un de l'entreprise qui se trouvait là le soir du crime ?

- Vous avez bien compris.

Un murmure parcourt l'assistance. Montanes est content de son petit effet.

- Après étude du registre des entrées, il y avait quatorze personnes dans le bâtiment ce soir-là, en dehors des vigiles et de la victime. Mes hommes ont visionné toutes les bandes de la vidéosurveillance et ont pu mettre hors de cause douze d'entre elles qui, aux heures possibles du crime, étaient avec des témoins, étaient à d'autres étages, étaient au parking, et qui n'ont pas eu le temps nécessaire pour monter sur le toit. Il n'y en a que deux qui n'ont pas d'alibi : Thomas Nache et vous, Mr Loyson.

Votre ami en reste estomaqué. C'est Anne-Sophie qui prend sa défense et demande à Montanes de cesser ses insinuations pernicieuses.

- Soyez sans craintes, Mlle Dattaque, la rassérène le contre-espion, il y a une autre explication. Notre criminel a pu se cacher toute la nuit et faire croire, dans la confusion du lendemain matin, qu'il était arrivé tôt à l'entreprise, alors qu'en fait il ne l'avait pas quittée. Une chose est sûre : à un moment ou à un autre il est passé devant les caméras et cela n'a choqué personne. C'est donc un habitué des lieux. Une preuve vient confirmer cette hypothèse : le pistolet qui a servi pour le meurtre a été retrouvé dans la chasse d'eau d'un WC de l'immeuble. Si l'assassin l'a laissé là, c'est qu'il craignait d'être fouillé à sa sortie.


Un sentiment de peur règne désormais dans la salle du conseil. Tous les membres de l'assistance semblent avoir peur que le commandant ne les accuse dans la seconde qui suit. Seul l'un des actionnaires se rebiffe :

- Toute votre démonstration repose sur le fait que Nache, le garde du corps, a dit la vérité. Qui vous dit que ce n'est pas lui qui a fait le coup ? Cela lui était facile.

- Lorsque j'ai repris l'enquête, explique Montanes, un détail m'a tout de suite mis sur la bonne piste : si l'homicide avait bien été commis par balle, l'assassin avait pris la peine de planter un kriss dans la gorge de sa victime sitôt après l'avoir tuée. À l'aide de cette arme peu ordinaire, il avait tracé avec le sang de Mr Dattaque une large croix en forme de X sur le mur, bien voyante, à côté du coffre-fort vide. Cette signature est celle d'un être maléfique que je connais bien : l'Agent X. Maintenant que les journaux ont vendu la mèche, vous savez un peu de quoi il retourne. Cet espion aime bien narguer les autorités en signant de gros coups de son X de sang. J'étais sûr que j'avais affaire à lui dès lors que le contenu du coffre de Mr Dattaque avait été dérobé. Seul lui pouvait oser perpétrer un tel forfait. Seul lui avait les contacts nécessaires pour revendre à bon prix des plans d'une telle importance.

Avant de poursuivre, il jette un regard acerbe à Cardoze, qui se renfrogne.

- L'Agent X n'est pas un mythe, contrairement à ce que certains pensent. C'est un génie du crime redoutable, spécialiste des affaires d'espionnage dans le milieu de l'armement. Il affole Interpol et nos services depuis des années. J'ai eu plusieurs fois maille à partir avec lui et j'ai même été tout prêt de le capturer, à plusieurs reprises. Il est déjà apparu plusieurs fois sur des vidéos, mais sur aucune on n'a pu distinguer son visage. Son identité a toujours été un mystère. On le dit Anglais, polyglotte, ainsi qu'expert en déguisement, capable de se faire passer pour n'importe qui. C'est un individu retors. Il ne laisse jamais d'empreintes digitales ou ADN derrière lui. Toutefois, au cours de ces années à le traquer, j'ai étudié ses moindres mimiques et tics, je saurais le reconnaître. J'ai également acquis la conviction qu'il est lié d'une façon ou d'une autre à Dattaque Industries ou à FBSA Industries. En recoupant toutes les affaires dans lesquelles il a été impliqué depuis le début de sa sinistre carrière, à chaque fois revient le nom de l'une de ces deux entreprises. Le déroulement des faits la nuit du crime tel que je vous l'ai exposé ne fait que confirmer cette conviction.

Il fait une pause, boit un verre d'eau et reprend :

- Le Ministère de la Défense savait qu'une puissance étrangère ou une organisation terroriste cherchait à acquérir les plans. C'est pour cela que le chef d'État a tout de suite demandé au commissaire Cardoze de me laisser les rênes de l'enquête. Ma mission était de retrouver l'Agent X avant qu'il ne vendît nos secrets militaires à l'ennemi. Ma traque a commencé par un acte déroutant de mon adversaire : la tentative de meurtre sur Didier Dattaque, le surlendemain du premier meurtre. Heureusement, il a échoué cette fois-ci ; seul Thomas Nache est mort, paix à son âme. Mais pourquoi X avait-il besoin de tuer le fils ? C'était incompréhensible. Pourtant, il n'a pas l'habitude de faire les choses au hasard. Était-ce parce que Didier Dattaque avait déclaré partout qu'il souhaitait succéder à son père ? Était-ce parce qu'il venait de payer la caution de Nache qui, suspecté par le commissaire, avait été placé en garde à vue ? J'ai tourné longtemps cet événement dans ma tête et j'en suis arrivé à la conclusion suivante : ce n'est pas l'Agent X qui est derrière cette tentative de meurtre.


L'assistance n'en croit pas ses oreilles. Surpris dans un premier temps, Didier demande :

- Vous voulez dire : c'est quelqu'un d'autre qui a cherché à me liquider ? Pour que je ne devienne pas PDG ?

- C'est cela. Quelqu'un comme l'Agent X ne rate jamais un assassinat de ce type. Maintenant, qui a voulu vous supprimer et pour quelle raison ? Je laisse cette affaire de droit commun au commissaire Cardoze, c'est de son ressort. Seul X m'importe pour l'heure. La seule chose de sûre, c'est que le meurtrier de Louis Dattaque ne pouvait pas être Nache. Les morts ne revendent pas des plans top secrets, et c'est qu'a fait le meurtrier.

L'assemblée fait soudain silence, attendant la suite de l'exposé de Montanes :

- Si toutes les présomptions désignaient l'Agent X derrière la mort de Louis Dattaque, il nous fallait des certitudes. Nous les avons eues quand mes services ont intercepté un message de X à son contact à l'ambassade de Biélorussie. Nous avons ainsi appris que notre espion allait assister au bal donné par l'ambassadeur, et profiter de cette occasion pour transmettre les plans volés à son contact. J'étais à l'ambassade ce soir-là, mais je n'ai pas réussi à empêcher la transaction... (vous sentez le ton de profond dépit dans sa voix) Les images prises par nos caméras espionnes nous ont montré l'Agent X en train de remettre les plans à son contact, certifiant ainsi sa présence en personne sur les lieux. Mais une fois encore, elles ne permettent pas de l'identifier.

Les personnes de l'assistance n'en reviennent pas que de tels actes criminels aient pu se dérouler sans qu'elles n'en aient eu le moindre soupçon.

- Les plans seuls auraient été longs à décrypter. De peur que ses acquéreurs ne veuillent pas les lui acheter pour cette raison, X a décidé de dérober le prototype MB409201, qui pouvait servir de clef de décryptage. Fidèle à sa démesure mégalomane, il n'a pas hésité, pour atteindre son but, à s'attaquer en plein jour au convoi militaire qui transportait le prototype. Vous l'avez certainement entendu à la radio : il a réussi. Il s'est enfui avec son butin au nez et à la barbe des soldats. Lors de sa fuite, on a entendu le complice de X l'appeler "Mr X". Preuve que là encore, c'est X qui a fait le coup en personne. Comment X savait-il que le prototype serait convoyé ce matin-là ? Comment connaissait-il le trajet du convoi ? S'il est lié à Dattaque Industries, comme je le crois, ceci explique cela.

- Maintenant que l'Agent X dispose des plans et du prototype, dit le Ministre sur un ton très inquiet, rien ne peut plus l'empêcher de livrer à l'ennemi un secret majeur de la défense de notre pays. Il faut l'intercepter avant qu'il ne passe la frontière. C'est la priorité absolue de toutes les forces dépendant de mon ministère.


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