En chemin pour l'église, à bord de sa voiture de fonction avec chauffeur, vous rapportez à votre employeur votre rencontre avec Cyprien Montanes et tout ce qu'il vous a dit sur l'Agent X. Laurent n'en revient pas.
- Cela me semble irréel, confesse-t-il tout de même. Robert Bolet serait "l'Agent X" ? On dirait un mauvais film d'espionnage. Je ne l'ai jamais spécialement porté dans mon cur, mais j'ai du mal à croire qu'il ait pu vivre une double vie comme celle-là. Il ne paraissait pas avoir la carrure d'un personnage de légende. L'enquête est donc bouclée ?
- Pas tout à fait. Le commandant Montanes pense que ce n'est pas lui notre coupable et veut attendre le convoyage du prototype militaire n° jesaipaquoi avant de le faire transférer dans une autre prison. Et puis il faut récupérer les plans volés. Il n'est pas seulement question de mettre la main au collet d'un assassin. Il faut aussi empêcher que des secrets militaires tombent entre de mauvaises mains et causent de nombreuses morts dans le monde.
- Et c'est toi qui as réussi à confondre Bolet ? Je n'en reviens pas ! T'es vraiment le meilleur, Nils. Si tu savais comme je suis content de t'avoir engagé !
- Pour sûr ! Tu vas pouvoir dire à tes actionnaires que c'est grâce à ton idée de m'engager que l'affaire a été résolue, répondez-vous avec malice.
La célébration des obsèques a lieu dans l'église d'un petit village à quelques dizaines de kilomètres de la ville. C'est le village où est né Louis Dattaque. L'édifice religieux ne manque pas d'allure avec ses belles arcades bien découpées et ses grands vitraux. Les premières personnes qui vous sont présentées sur le perron -des actionnaires et des membres de la famille éloignée de Dattaque- vous apprennent que c'est le défunt PDG lui-même qui en avait financé la restauration. Tous vous félicitent pour avoir élucidé le crime. Entièrement vêtue de noir et les yeux rougis, mais l'esquisse d'un sourire aux lèvres, Anne-Sophie Dattaque vient à votre rencontre. Elle vous remercie vivement d'avoir fait arrêter le responsable de la mort de son père.
- J'aurais dû faire davantage confiance à Laurent lorsqu'il disait que vous résoudriez cette affaire. Je vous confesse en avoir grandement douté. Je n'ai jamais eu confiance en Robert Bolet. Je ne suis pas étonnée que ce soit lui le criminel. Mon père l'avait senti. Il ne l'avait pas viré sans raison. Maintenant, grâce à vous, je peux faire son deuil.
La cérémonie religieuse commence peu après. Pendant que le prêtre invite à la prière et au recueillement entre deux louanges à l'égard du défunt (son défunt mécène, après tout), vous prenez le temps d'observer les personnes présentes. Vous avez pris place dans une aile, à l'écart, afin de pouvoir embrasser l'assistance d'un regard. Vous vous retrouvez assis à côté d'une grand-mère sourde comme un pot qui, dès que le curé prononce "amen", se met à débiter le
Notre Père à toute vitesse.
Vous ne réussissez pas à mettre un nom sur le visage de grand monde. Aux premiers rangs, vous reconnaissez quand même le Premier Ministre, le Ministre de la Défense et le Ministre de l'Intérieur. Vous repérez aussi quelques personnalités du show-biz, dont vous vous demandez bien l'intérêt de la présence ici. À un moment, Anne-Sophie Dattaque, monte au pupitre réciter un passage de l'Évangile, mais elle ne parvient pas à le terminer, terrassée par l'émotion de voir là, devant elle, le cercueil où repose son père. Dans un murmure circonspect, l'assistance voit alors ce brave Laurent voler à son secours, tel un chevalier servant, et aider la jeune femme à regagner son banc. Côté absences de marque, nul n'a manqué de noter celle de Didier, le propre fils du défunt. Ainsi que celle de Robert Bolet, et pour cause.
L'oraison funèbre achevée, quelques hommes forts, parmi lesquels Laurent, soulèvent le cercueil et prennent la tête d'une procession funéraire en direction du cimetière tout proche. Dehors, une nuée de journalistes les accueille par des flashs. La cause du décès de Louis Dattaque a été dévoilée dans la presse ce matin. C'est la lutte pour avoir le meilleur cliché ou la meilleure image pour le 20 heures de ce soir. Comment ont-ils finalement appris qu'il s'agissait d'un assassinat ? Qui leur a vendu la mèche ? Cela n'a plus tellement d'importance désormais.
Au cimetière, une nouvelle prière est entonnée avant que la bière ne soit enfouie dans le caveau familial. Au cinéma, il pleut toujours lors des enterrements. Cet après-midi, c'est un beau soleil qui éclaire la scène et tombe dans les yeux des participants. Protégé de l'éclat par votre fidèle feutre, vous remarquez alors qu'il y a une autre personne présente dans le cimetière. Vous la repérez furtivement derrière les hautes pierres tombales. Elle semble épier ce qu'il se passe.
Si vous souhaitez fausser compagnie aux participants pour vous diriger vers ce voyeur, allez voir au
379.
Si vous préférez rester écouter la prière, rendez-vous au
696.