Robert Bolet est présent également. Il porte le même costume qu'hier et sa tenue est encore plus négligée que lorsque vous l'avez quitté. Il a été interrogé toute la nuit par la police et le juge l'a relâché sous contrôle judiciaire. Ses cernes témoignent d'une grande fatigue psychologique. Montanes le présente comme l'espion de seconde zone connu sous le pseudonyme du "Colonel". Il travaillait depuis des années en sous-main pour le compte de FBSA Industries, l'entreprise concurrente. Anne-Sophie et Laurent sont abasourdis de l'apprendre. Ils savaient qu'il avait été arrêté car soupçonné d'être l'Agent X, meurtrier de Louis Dattaque, puis qu'il avait été lavé de cette accusation. C'est pour cela qu'ils n'avaient pas été tellement surpris de ne pas le voir hier au conseil d'administration extraordinaire. Ils ne se doutaient pas qu'il était coupable d'autre chose dans cette affaire. Quand Loyson voit que Didier, lui, n'est nullement étonné, il s'en prend à lui ouvertement :
- C'est comme ça que tu as eu la majorité au conseil d'administration hier : tu l'as fait chanter et t'as fait main basse sur ses actions, ordure !
L'héritier s'indigne de cette attaque et riposte de façon tout aussi peu amène. Le Ministre est à nouveau obligé de calmer tout le monde. C'est au tour d'Anne-Sophie d'apostropher Bolet :
- Comment avez-vous pu faire une chose pareille, Robert ? Mon père avait confiance en vous.
- Vous savez, Mlle Dattaque, quand vous mettez le doigt dans l'engrenage de l'espionnage, il est quasiment impossible d'en sortir...
- Non, je ne sais pas, et je crois que cela vaut mieux.
Montanes finit de présenter le Colonel en expliquant que, par le passé, il a déjà été soupçonné dans le cadre d'enquêtes sur l'Agent X, et même arrêté une fois. Mais à chaque fois il est apparu qu'il n'avait rien à voir là-dedans. Il fait partie du menu fretin de l'espionnage. Il en va différemment de son employeur, le sinistre Lord, alias Nelson Delmas, le PDG de FBSA Industries, que le contre-espion présente comme un redoutable espion international. Une fois encore, c'est la stupéfaction totale dans la salle à cette terrible révélation.
- Décidément, il n'y a que des espions dans cette affaire...! lâche Anne-Sophie, dans un soupir déconcerté qui résume bien l'effarement général. Mais elle ne croit pas si bien dire.
Didier demande alors, avec une certaine curiosité, qui est la jeune femme blonde menottée et sous sévère garde policière que vous avez amenée avec vous. Le commandant du contre-espionnage la présente comme le témoin le plus capital de cette réunion : Mlle Zadilova.
- Prénom et lieu de naissance inconnus, une tueuse à gages redoutable, doublée d'une espionne retorse bien connue de mes services. Elle est au service de l'Agent X, elle sait donc tous les détails du meurtre de votre père.
Cette fois, l'assistance reste interdite, complètement ahurie même. Cela fait trop de révélations pour une seule matinée. Didier veut qu'on la fasse parler, mais Montanes lui demande un peu de patience. Le Ministre, lui, montre pour la première fois des signes de soulagement. Il paraît quelque peu rassuré quant à l'issue de cette réunion.
- Je reviendrai à elle bientôt, dit Montanes. Il ne manque à cette table qu'un seul protagoniste de l'affaire, Mr Nelson Delmas, notre "Lord". Il aurait au un paquet d'éclaircissements à nous apporter, mais il ne pourra pas être des nôtres : il a été tué par l'Agent X hier après-midi.
Nouvelle stupeur au sein de l'auditoire, pas encore blasé. Et pour cause : les médias n'ont absolument pas parlé de ce décès. Les questions se pressent de toutes parts : comment cela est-il arrivé ? pourquoi ?
- Je vais y venir. Mais d'abord, je dois vous faire un point global de la situation.
Rendez-vous au
600.