Au moment du café, vous envisagez avec le commissaire les possibilités d'action pour cet après-midi.
C'est alors que, dans un grand bruit de porte qui claque, Laurent Loyson déboule en trombe dans la salle de restaurant et vient se planter devant votre table.
- Qu'arrive-t-il ? lui demandez-vous. Tu sembles essoufflé. Tu as couru ?
- Je te cherche depuis des heures, Nils !
- Qu'y a-t-il de si urgent ? Quelque chose de grave ?
- Oui ! Cet après-midi, c'est l'enterrement de Mr Dattaque et je tiens à ce que tu y assistes.
- Je ne vois pas en quoi c'est si impératif. Pour quelle raison veux-tu que je t'y accompagne ? Tu ne crois pas que je serais plus utile à enquêter autre part ?
- Justement non, il y aura la plupart des actionnaires de Dattaque Industries à ces funérailles et ils vont me cuisiner à petit feu. Tu as vu les titres des journaux ? Ils vont vouloir savoir où en est l'enquête. Je leur ai caché le caractère criminel du décès mais ça n'aura servi à rien, je vais avoir l'air fin ! Ils vont me tuer quand je vais leur dire que le coupable n'a pas encore été arrêté. Il faut absolument que tu viennes avec moi pour m'aider.
Vous avez du mal à cerner en quoi votre présence peut lui être d'un quelconque secours face à des actionnaires, mais vous comprenez ce qu'il se passe. Laurent panique complètement. Maintenant que le meurtre a été porté à la connaissance du grand public, il ne maîtrise plus la situation et il a peur qu'on attaque sa position de directeur par intérim. Il veut que vous soyez la caution de sa volonté d'agir. Et vous n'avez pas moyen de lui refuser. C'est votre employeur. Vous abandonnez donc le commissaire et quittez la brasserie avec Loyson.
En chemin pour l'église, à bord de sa voiture de fonction avec chauffeur, vous lui rapportez votre rencontre avec Cyprien Montanes et tout ce qu'il vous a dit sur l'Agent X. Laurent est vivement intéressé. Bien sûr, il ne pourra pas ébruiter ces informations confidentielles auprès de ses actionnaires, mais il a l'impression que l'enquête avance.
- Cela me semble irréel, confesse-t-il tout de même. "
L'Agent X" ? On dirait un mauvais film d'espionnage. Tu crois qu'il y aura moyen de récupérer les plans volés ?
- Espérons-le. Il n'est pas seulement question de mettre la main au collet d'un assassin. Il faut aussi empêcher que des secrets militaires tombent entre de mauvaises mains et causent de nombreuses morts dans le monde.
- Tu penses que ce commandant Montanes est capable de vaincre cet espion ?
- Je vais tenter de l'y aider, répondez-vous avec malice.
La célébration des obsèques a lieu dans l'église d'un petit village à quelques dizaines de kilomètres de la ville. C'est le village où est né Louis Dattaque. L'édifice religieux ne manque pas d'allure avec ses belles arcades bien découpées et ses grands vitraux. Les premières personnes qui vous sont présentées sur le perron -des actionnaires et des membres de la famille éloignée de Dattaque- vous apprennent que c'est le défunt PDG lui-même qui en avait financé la restauration. La demi-heure précédant la messe est pour vous un calvaire. Vous devez ne pas quitter Laurent d'une semelle et rassurez chaque personne qu'il vous présente sur l'avancement de l'enquête. Un véritable travail à la chaîne. Vous n'arrivez pas à retenir ne serait-ce qu'un visage. La cérémonie religieuse vient à point nommé pour vous permettre de souffler et de rassembler vos idées. Pendant que le prêtre invite à la prière et au recueillement entre deux louanges à l'égard du défunt (son défunt mécène, après tout), vous prenez le temps d'observer les personnes présentes. Vous avez pris place dans une aile, à l'écart, afin de pouvoir embrasser l'assistance d'un regard. Vous vous retrouvez assis à côté d'une grand-mère sourde comme un pot qui, dès que le curé prononce "amen", se met à débiter le
Notre Père à toute vitesse.
Vous ne réussissez pas à mettre un nom sur le visage de grand monde. Aux premiers rangs, vous reconnaissez quand même le Premier Ministre, le Ministre de la Défense et le Ministre de l'Intérieur. Vous repérez aussi quelques personnalités du show-biz, dont vous vous demandez bien l'intérêt de la présence ici. Côté famille, Anne-Sophie Dattaque, entièrement vêtue de noir et les yeux rougis de larmes, monte au pupitre réciter un passage de l'Évangile, mais elle ne parvient pas à le terminer, terrassée par l'émotion de voir là, devant elle, le cercueil où repose son père. Dans un murmure circonspect, l'assistance voit alors ce brave Laurent voler à son secours, tel un chevalier servant, et aider la jeune femme à regagner son banc. Côté absences de marque, nul n'a manqué de noter celles de Robert Bolet, peut-être encore fâché contre Louis Dattaque, et surtout de Didier, le propre fils du défunt.
L'oraison funèbre achevée, quelques hommes forts, parmi lesquels Laurent, soulèvent le cercueil et prennent la tête d'une procession funéraire en direction du cimetière tout proche. Dehors, une nuée de journalistes les accueille par des flashs. La cause du décès de Louis Dattaque a été dévoilée dans la presse ce matin. C'est la lutte pour avoir le meilleur cliché ou la meilleure image pour le 20 heures de ce soir. Comment ont-ils finalement appris qu'il s'agissait d'un assassinat ? Qui leur a vendu la mèche ? Laurent n'a pas réussi à tenir le secret gardé.
Au cimetière, une nouvelle prière est entonnée avant que la bière ne soit enfouie dans le caveau familial. Au cinéma, il pleut toujours lors des enterrements. Cet après-midi, c'est un beau soleil qui éclaire la scène et tombe dans les yeux des participants. Protégé de l'éclat par votre fidèle feutre, vous remarquez alors qu'il y a une autre personne présente dans le cimetière. Vous la repérez furtivement derrière les hautes pierres tombales. Elle semble épier ce qui se passe.
Si vous souhaitez fausser compagnie aux participants pour vous diriger vers ce voyeur, allez voir au
379.
Si vous préférez rester écouter la prière, rendez-vous au
696.