La scène que venait de faire Halade vous apparut très révélatrice. Ce qui l'animait, ce n'était pas de la colère contre un voleur. C'était plutôt une sorte de haine. Vous auriez même dit
de la jalousie. Ce qui vous donna une idée. Vous retournâtes voir Ducult.
- Votre ancien patron vous déteste vraiment fort, on dirait.
- Euh
oui.
- Un peu trop fort pour quelqu'un qui vous aurait licencié juste parce que vous étiez mauvais dans votre travail. Et j'ai tendance à vous croire quand vous dites que vous auriez commencé par voler le tableau. Il ne vous a pas mis à la porte pour vol. Je pencherais pour un autre motif.
Ducult vous jeta un regard soupçonneux.
- Lequel, d'après vous ?
- À vous de me le dire.
Ducult ne répondit rien. Vous lançâtes votre deuxième banderille :
- Imaginons que des témoins m'aient confié avoir souvent vu votre voiture vers les ruines, à la sortie du passage secret de la maison Halade. Pas seulement le soir du vol. Imaginons que Mme Halade, l'épouse plus jeune de Mr Halade, ait utilisé plusieurs fois ce passage secret sans que ça se sache
- Quoi ?! Elle nous aurait menti !? fulmina Cardoze.
- Allait-elle rejoindre quelqu'un, Mr Ducult ?
Se sentant acculé, le jardinier finit par craquer et avoua : il était l'amant de Mme Halade. Votre intuition était bonne, et il n'avait pas résisté longtemps à votre bluff. Le mari se doutait de quelque chose, et l'avait renvoyé un jour où une situation s'était révélée trop tendancieuse. Mais ils avaient continué de se voir en cachette.
- Vous connaissiez l'existence du passage secret, n'est-ce pas ? voulûtes-vous savoir.
- Oui. Angélique me l'avait montré.
- Qui d'autre était au courant ?
- Aucune idée. De mon côté, je n'en ai jamais parlé à personne. Faut demander à Angélique.
- Vous alliez la rejoindre, le soir du vol ? demanda le commissaire.
- Oui. Mais pas pour du sport de chambre. En fait, elle m'a téléphoné pour me demander de venir. J'ai trouvé ça fou, avec tous ces journalistes et ces curieux dans le coin ! Mais elle avait l'air agité, c'est à peine si j'ai reconnu sa voix.
- Pourquoi tenait-elle à ce que vous veniez ?
- Elle craignait que le voleur empruntât le passage secret. Comme elle ne voulait pas en parler à son mari, elle m'a demandé de le surveiller.
- Et donc vous êtes venu, comprit Cardoze. Ça explique votre présence sur place. Et du coup, que s'est-il passé ? Qu'avez-vous vu ?
Ducult reprit sa respiration.
- J'attendais à côté de ma voiture, comme elle me l'avait demandé, en faisant le guet. Mais j'ai été chloroformé. Quelqu'un qui s'est glissé derrière moi. Quand je me suis réveillé, j'ai entendu les sirènes et les chiens, je me suis dit que j'étais dans de sales draps et j'ai fui.
Châtaing n'avait pas dit un mot pendant que vous obteniez ces révélations. Lorsque vous vous retrouvâtes seuls avec le commissaire et lui, il livra un avis tranché :
- Je ne le crois pas un seul instant ! Chloroformé ? Ça ne tient pas debout ! Ça voudrait dire que le Voleur d'Ombres avait prévu le coup en amenant du chloroforme et l'attendait ? Comment aurait-il su que Mme Halade ferait appel à lui ? Il n'y a aucune raison !
- Le voleur ne l'attendait pas forcément, objecta Cardoze. Il avait peut-être juste du chloroforme au cas où. Si Mme Halade confirme l'histoire, on peut dire qu'il s'est juste trouvé au mauvais endroit au mauvais moment. Et le voleur a neutralisé cet obstacle.
- Mais c'est lui le Voleur d'Ombres, forcément ! Il n'y avait pas d'autre voiture !
- Nous avons cru que cette voiture grise était celle du voleur. Mais peut-être que le vrai voleur n'était pas en voiture et qu'il en a profité pour partir dans une autre direction, par un autre moyen.
Vous repensâtes à quelque chose que vous vous étiez dit après le vol chez Halade : et si le voleur vous avait égarés, Châtaing et vous, à l'aide d'ombres chinoises
Dans ce cas, où avait-il pu disparaître ?
Notez les mots-codes "CHLODU" et "ANGAMA" dans votre Journal d'Enquête et soulignez le mot ANGAMA. Puis rendez-vous au 1053.