- Oui, il est avéré que c'était Ducult, fîtes-vous. Et vous le savez aussi.
Elle vous regarda avec la surprise d'une enfant prise à voler.
- Puis-je savoir ce que vous voulez dire ?
- Ducult a avoué.
- Il a avoué
quoi ? Je ne vois pas de quoi vous voulez parler.
- Que vous étiez amants.
Elle demeura sans voix un instant, sans montrer les émotions qui luttaient en elle.
- Mon mari sait ?
- Personne ne lui a dit, que je sache. Mais il a piqué une grosse colère, le jour où Ducult a été arrêté
Peut-être est-il déjà au courant
?
- Je pense que c'était vraiment parce qu'il veut retrouver son tableau. Horace est à cheval sur les principes, en particulier les principes de propriété
- Ducult a dit que vous l'aviez appelé le soir du vol pour qu'il vienne à la propriété, est-ce vrai ?
- Oui, ça l'est
Elle expliqua qu'en réalité, elle connaissait l'existence du couloir secret. Il leur permettait de se voir sans que Ducult n'eût à passer devant le majordome ou les caméras de la cour. La porte cachée ne s'ouvrait en fait que de l'intérieur, en raison du mécanisme usé. Elle était restée déverrouillée après la dernière visite de Ducult et, quand il y eut l'annonce du vol via la carte de visite, la police et le personnel de maison étaient toujours restés dans la bibliothèque et son boudoir attenant, aussi avait-il été impossible pour elle d'en approcher pour la refermer.
- Si j'avais tenté de la refermer, on aurait vu qu'elle existait et que je le savais, soupira-t-elle. Horace aurait vite compris l'utilité que j'en avais
Alors j'ai appelé David pour qu'il vienne le soir du vol veiller que le voleur ne passe pas par là. Au cas où, car seuls David et moi étions au courant.
- Et pas votre mari ?
- Non, je suis certaine que non. Il n'y avait que David et moi.
- Sauf si un jour, quelqu'un vous a vus emprunter ce passage, intervîntes-vous.
- Certes
Qui, par exemple ?
- Le Voleur d'Ombres connaissait l'existence de cette porte secrète et savait qu'elle était restée ouverte, c'est admis maintenant. Si Ducult n'est pas le voleur, c'est que ce dernier a dû vous voir emprunter le passage alors qu'il était en train de faire ses repérages en vue du vol. Soit il vous a vus de l'extérieur, vers les ruines
ou alors de l'intérieur.
- Aucun membre de cette maisonnée ne peut être votre voleur !
- Vous êtes bien sûre de vous.
- Ni mon mari, ni le vieil Octave, ni Dépreaux qui est infirme n'ont les capacités physiques pour vous échapper.
- Une personne ici a pu voir votre manège avec Ducult et le rapporter au voleur. Peut-être même sans le savoir, d'ailleurs.
- La seule personne au courant de notre liaison était Faiza ma femme de chambre. Ma complice. Et j'ai toute confiance en sa discrétion.
- C'était donc pour ça que vous ne vouliez pas d'enquêteur dans la bibliothèque ou votre boudoir
de peur que l'on ne découvrît votre stratagème.
- Oui
C'était très bête, finalement, car vous savez tout maintenant.
Vous dévoilant toute sa fragilité, Angélique Halade s'épancha de façon inattendue. Si elle avait fini avec un séducteur comme Ducult, c'était qu'elle n'avait aucun véritable ami dans cette ville, à part deux ou trois. En épousant Halade, elle ne s'imaginait pas à quel point le gratin de la société était guindé et hypocrite.
Finalement, elle vous pria de la laisser. Vous vous apprêtiez à le faire quand vous revîntes sur vos pas. Vous aviez une dernière question :
- C'est vous qui avez engagé l'avocate Narjis Renoir, n'est-ce pas ?
- Oui
, avoua-t-elle.
Elle vous suivit du regard jusqu'à ce que vous eussiez disparu. Se sentant seule, elle tritura ses bagues machinalement, puis elle se mit à pleurer.
Si on vous a dit qu'Horace Halade était absent ce jour, rendez-vous au 841.
Sinon, rendez-vous au 4.