Comme vous vouliez vous mettre en route sans attendre, Amy s'inquiéta :
- Vous n'avez même pas soupé !
- Je trouverai bien de quoi manger sur place, je suppose.
À peine avait-elle fini le nud papillon de votre smoking que vous étiez déjà sorti de votre cabinet.
Lorsque vous arrivâtes dans le quartier chic de la ville où la Galerie Dalembert avait pignon sur rue, c'était l'effervescence. Une multitude de curieux avait envahi la rue ; vous dûtes vous garer à plus de deux cent mètres. Ils s'étaient massés devant la galerie mais ils ne pouvaient entrer, la réception qui y était donnée ce soir était sur invitation seulement. Les policiers qui les repoussaient peinaient à effectuer leur tâche de maintien de l'ordre. Vous contactâtes Châtaing qui vous fit passer par la porte arrière ; la police avait aménagé un cordon pour pouvoir y accéder, en contenant la pression de la foule derrière des barrières. L'inspecteur ne savait plus où donner de la tête.
- Nous avons dû délimiter un périmètre pour empêcher les fadas d'encercler le bâtiment !
- Les "fadas" ?
- Les curieux qui veulent assister au vol en direct et retransmettre ça sur les réseaux sociaux... Ils assiègeraient presque la galerie ! Faut arrêter cet olibrius avant que le phénomène ne s'amplifie !
Un malin, ce Voleur d'Ombres ! Ces messieurs tout le monde excités mobilisaient une partie des effectifs de police. Il pouvait s'introduire dans l'immeuble à la faveur de la nuit.
Mr Dalembert, le directeur de la galerie éponyme, avait eu la rentable idée d'organiser une réception privée et onéreuse destinée aux personnalités huppées de la ville, du pays et même d'ailleurs. En mettant une coquette somme sur la table, elles obtenaient ainsi le privilège d'être aux premières loges quand la tentative de vol aurait lieu. Au pire, si le voleur parvenait à ses fins, la recette de la soirée compenserait la perte. La galerie était donc pleine de monde, ce qui rendait des plus difficiles le travail de la police.
Vous retrouvâtes le commissaire Cardoze en compagnie du directeur de l'endroit. En équilibre précaire entre la joie de l'argent qui rentrait et l'inquiétude d'une future victime de vol, Dalembert avait laissé à votre ami les mains libres pour organiser la sécurisation du site comme bon lui semblait. À voix basse et à l'écart du public, Cardoze vous décrivit le dispositif qu'il avait mis au point pour piéger le voleur. Le sol autour du tableau était recouvert d'un marqueur chimique invisible. Aussi rapide qu'il fût, quand le malfaiteur s'emparerait de la peinture, ses semelles seraient souillées par la matière indélébile. Il pourrait alors voler toutes les ombres qu'il voudrait, il serait dans l'incapacité d'effacer ses traces.
Laissant vos hôtes, si on pouvait dire, vous vous mêlâtes à la foule des convives qui buvaient du champagne en évoquant le frisson qu'ils éprouvaient. Guidé par votre estomac vide, vous cherchiez le buffet, en vain. Ils avaient quand même bien prévu un buffet ?! Dans la grand salle, où la couleur blanche était reine, se côtoyaient uvres classiques et contemporaines. Un attroupement s'était formé dans une même zone, autour de la Jonque sur le Fleuve Jaune, bien sûr.
On pénétrait dans cette vaste salle par le hall d'entrée, mais aussi par une arrière-galerie, que vous aviez empruntée en entrant par la porte de derrière. Elle donnait accès à des bureaux ou d'autres couloirs. Vous repérâtes nombre de caméras à capteurs de mouvement.
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Sinon, rendez-vous au 450.